Alix Soulié

Cambodge

Lundi 16 mai 2011 ( Bangkok)

07:00

Monsieur « Guest House » me réédite gentiment le bon que j’ai perdu pour le voyage du Cambodge. Le minibus est là, le sourire inquiet il me regarde partir avec tous mes bagages. Après le ramassage d’autres voyageurs pour le Cambodge, nous sortons de Bangkok.

Tout au long de la route, nous voyons défiler des scènes du quotidien plus surprenantes les unes que les autres.

En arrivant à la frontière, des hommes nous prennent en main à la terrasse d’un café pour faire les visas. Pas si compliqué que ça ! Tous les blogs et témoignages de voyageurs que j’ai pu lire se plaignaient de l’inconfort de la route, de l’attente interminable et d’un manège insupportable au passage des frontières.

A la table d’à côté, on parle français : c’est Caroline, Marie et son frère qui vont au Cambodge pour voir des temples. Je les interpelle pour qu’ils m’aident à remplir les documents. Je n’ai pas communiqué avec des Français depuis plusieurs semaines, ou très peu, et ma première approche est froide et distante.

11:30

Nous passons la première frontière ensemble, l’homme qui nous a aidés à remplir les fiches me signale un problème : je n’ai plus dans mon passeport le petit bout de papier que la douane m’avait agrafé à l’aéroport, et qu’il faut présenter pour sortir du pays. On me demande de régler 500 bhat (11€) pour quitter le pays. Je demande pourquoi et après une grosse colère qui retarde le groupe, je ne paierai pas cette somme parce-que je sens l’embrouille ! … et surtout parce que je n’ai pas cet argent (vu que Bouygues n’a pas résilié mon forfait téléphonique et que je continue de débourser 50 € par mois au lieu de 19). Sur le trottoir devant un guichet automatique où il me signifie que je peux retirer de l’argent, l’homme craque face à ma détermination et sort de sa poche un carnet vierge de ce même petit bout de papier qui manque à mon passeport. Il y marque quelques mots (nom, prénom, date…), seul y manque le tampon. Au contrôle des papiers, le douanier n’y voit que du feu. Pas si compliqué de se faire comprendre, merde alors.

Traversée de la zone verte à pied, où se croisent des populations équipées de chargements hétéroclites. Arrivés à la frontière du Cambodge, même les douaniers ont le sourire. Un vieux bus nous emporte dans une immense gare routière où nous sommes les seuls voyageurs et où nous pouvons changer notre argent. Il ne me reste vraiment pas grand chose en poche mais, après être passée en caisse, ma sacoche n’est pas assez grande pour contenir les liasses de billets que la femme vient de me rendre. Nous attendons un minibus qui ne partira que lorsqu’il sera complet. On nous invite donc à rajouter 400 bhats pour un taxi mais nous ne cédons pas et n’attendons au final que quelques minutes pour le remplissage du bus. Sur le trajet, je découvre le paysage rural cambodgien et l’histoire en détails de nos trois petits Français. Finalement nous arrivons à 16h au lieu de 19h à Siem-Reap. Chacun part de son côté devant cet office de voyage avec le projet de manger ensemble ce soir… pour mon anniversaire ! Je n’ai pas le mail de Marie, elle a ma carte et la soirée qu’elle m’a proposée dépendra d’elle…

17:00

J’arrive dans ma nouvelle maison où la chambre à 6 dollars que j’avais réservée est encore occupée. Je bénéficierai donc d’une suite nuptiale pour le même prix. Pour moi seule un lit démesuré de 3m sur 2 (j’ai calculé avec mes pieds !).

20:00

Toujours aucune nouvelle des Français. Je vais donc dîner dans un restaurant à côté, en tête-à-tête avec un frigidaire.

21:00

Retour dans ma chambre pour des ultimes mails afin d’avoir des contacts à Siem-Reap où rien n’est encore prévu.

0:00

Happy birthday ! Je fête mon anniversaire avec Raf, mon super secrétaire relations internationales, via Skype. Bonne nuit !

Mardi 17 mai 2011 –

09:00

Qu’est-ce que je vais faire ici ?!

Ah ! Deux mails…

11:00

Les garçons de l’hôtel m’invitent à changer de chambre alors que je suis en plein échange mail. L’ordinateur sous l’aisselle, je découvre une chambre plus petite que le lit de celle que je viens de quitter. Et surtout avec une grande différence de température (fini la clim’ !).

12:00

Le responsable du centre culturel français de Siem-Reap me propose de passer me prendre pour déjeuner. Petite virée en scooter – restaurant couleur locale – présentations – quelques idées – et voici mon planning qui prend forme.

14:00

Nous entrons au CCF où je fais connaissance de toutes ces femmes dont il m’a parlé. Ben voilà, c’est tout simple finalement !

Anna son assistante me propose de venir ce soir avec ses deux amies au restaurant. Et puis ce sera l’occasion de fêter mon anniversaire ! Elle habite la guest house juste en face de la mienne.

19 :00

Elle passe me prendre avec Claire une grande et belle Nigérienne et nous rejoignons en touk-touk Judith, qu’elles viennent de rencontrer et qui est jamaïcaine. Notre table au restaurant ne passe pas inaperçue : 2 très noires et 2 très blanches ! Je n’ai pas saisi toutes les subtilités de la discussion en anglais mais leurs échanges, lents pour ma compréhension, bien que passionnés, traitaient justement des critères de beauté et de la couleur de la peau, et encore d’autres sujets en rapport avec notre place de femme.

Claire : plus de 25 ans, anglaise d’origine nigérienne, en vacances dans la même pension qu’Anna, dispense des cours d’anglais en Corée.

Judith : la cinquantaine, une petite Whoopi Golberg, d’origine jamaïcaine qui vit à Miami, dispense des cours de cuisine en Chine.

Après un verre je suis déjà bien, je ne les suivrai pas jusqu’au troisième. Touk-touk. Juste la force de monter les escaliers de cette magnifique maison coloniale dont les marches ne sont pas aux dimensions européennes, et plus personne.

Mercredi 18 mai 2011.

11:00

Je rencontre par hasard notre directeur, son assistante et d’autres du CCF attablés dans une cantine.

12:00

Visite des ateliers d’artisanat de la ville.

15:00

Nouvelle rencontre par hasard d’un couple d’artistes à moto que j’avais rencontré la veille au CCF : Roberta et son gars, qui vient de traverser le Cambodge en tirant à pied une grosse boule d’aluminium (diamètre : 2m) pour sa dernière performance d’artiste-plasticien.

16:00

Interview au CCF de notre charmante secrétaire cambodgienne du centre.

18:00

Avant la fermeture du centre, j’assiste à un cours de révision de français à des tout-petits que dispense l’animatrice Ria So. Fin de la journée.

Jeudi 19 mai2011.

09:00

Bus pour la visite des ateliers de soie en Province de Siem-Raep où des femmes travaillent la soie du début à la fin.

14:00

J’ai cédé aux encouragements multiples de visiter le Temple d’Angkor. Malgré moi, contrariée, je m’exécute, excédée par le business étouffant de ce lieu « culte ».

Alors que je rentre dans le dernier temple, je tombe nez-à-nez avec une grande brune qui porte une jolie robe verte que j’envie d’abord, puis que je reconnais : c’est mon petit lapin français, Marie de la frontière cambodgienne. Elle me propose la visite guidée de ce temple qu’elle sillonne depuis deux jours, il est tout petit mais c’est le plus beau de tous. La nature a pris le dessus merveilleusement bien. Nous nous quittons cette fois avec un rendez-vous précis pour dîner ensemble tous les quatre (avec ses deux acolytes).

19:00

Je retrouve nos trois petits Français pour une « riz-nouilles » party. Fin de la journée, bye-bye et bonne route.

Marie a une histoire hors du commun : il lui faudrait un livre pour raconter ses 28 années de voyages incessants.

21:00

Retour à l’auberge. Il fait chaud et toujours pas de pluie. Où est la saison promise ? Mais j’ai dans ma chambre une petite salle de bains formidable : lavabo, toilettes et douche tout-en-un. Très rafraîchissant, pas d’eau chaude et c’est tant mieux.

Vendredi 20 mai 2011.

09:00

J’ai rendez-vous au CCF avec Ria So qui m’invite chez elle pour son interview.

Ria So a un corps de brindille et porte toujours de jolis chemisiers. Comme je suis à pied et elle à bicyclette, c’est moi qui la porterai sur le porte-bagages. Curieuse combinaison que cette blanche qui porte une Khmer : nous ne passons pas inaperçues en traversant la ville et son quartier. Une invitation inoubliable, une femme exemplaire d’une cinquantaine d’années qui apprend à tous ses enfants du CCF tout ce qu’elle peut leur transmettre. Elle est autodidacte et boulimique de savoirs.

11:00

Nous cuisinons par terre, sans table, la soupe du déjeuner et voici quelques phrases qu’elle m’a fait noter et qu’elle veut donner au monde entier :

– « Le Bien, c’est le trésor de la vie »

– « L’amitié, c’est la clef du monde »

Ria So porte en elle l’Histoire du Cambodge dans tout ce qu’elle a de souffrances, mais tout ça est du passé.

11:30

Je la ramène en bicyclette jusqu’au CCF où elle dispense un cours de français.

14:00

Rendez-vous avec Ampor, la directrice de l’ONG Friends Cambodia ( http://friends-international.org/index.asp), pour un entretien au cours duquel une pluie diluvienne s’abattra enfin sur la ville. Cette discussion m’éclairera plus sur la société cambodgienne et sur les ONG qui ne se comptent plus.

17:00

Je retrouve Ria So au CCF après avoir traversé une ville inondée. Nous convenons de nous revoir dans la soirée.

20:00

Ria So me reçoit chez elle avec sa fille pour une dernière soirée à Siem-Raep. Quel honneur d’être invitée dans leur minuscule chez elles à nouveau !

22:00

Sa fille s’est endormie dans son uniforme de collégienne sur le carrelage frais de la maison, bercée par nos voix qui parlent cette langue qui lui est inconnue. Ria So me raccompagne jusqu’à la ruelle sombre, un raccourci pour mon auberge dans lequel elle n’est pas rassurée de me laisser dans cette nuit noire.

Samedi 21 Mai 2011

Pas dormi, peut-être trop de choses en tête, trop de choses à noter, trop d’affaires courantes à régler. Le jour se lève, mes yeux se ferment, mais bientôt le réveil sonne.

6h00 : Tiens! J’ai même pas fait ma valise! Pas grave, je la connais par cœur, facile!

8h00 : Navette devant l’auberge pour la station de bus.

9h00 : Dans un grand bus où nous traversons le Cambodge pour rejoindre la capitale Phnom Penh , où j’ai décidé hier de rejoindre Cannelle avant de reprendre un bus direct pour le Laos

Des villages, des visages, des gens qui montent et qui descendent, le soleil nous étouffe

15h00 : Phnom Penh, j’ai bien étudié le plan avec les consignes de Cannelle pour rejoindre leur maison.

(Cannelle je ne la connais pas, c’est une connaissance de Brok un ami de Paris qui nous a mis en contact. Nous échangeons des mails plusieurs fois pour tenter de trouver des pistes et des contacts au Cambodge.)

Donc je traverse de longues avenues avec mes 56 kg de bagages, je prend mon temps car le ciel est lourd et mes bras aussi. Dans cette ville inconnue mes joues sont écarlates j’entends mon prénom en boucle loin derrière moi, une voix d’homme.

C’est pas fou ça ! Mr le Directeur du CCF de SIEM REAP, qui m’a vue passer dans la rue :

– mais qu’est-ce que tu fais là? Fallait me le dire je t’aurai descendu en voiture jusqu’à Phnom Penh!

– Beh je te l’ai dit hier…

Ah ! Ce garçon est débordé et n’entend pas toujours ce qu’on lui dit.

– Peut-être à ce soir, Cannelle m’a dit qu’il y avait un concert organisé par le CCF de Phnom Penh

– Peut-être…

16h00 : Je toque à la porte de cette grande maison au fond de l’impasse. Très fort comme Cannelle me l’a demandé. C’est Stéphane son compagnon qui m’ouvre, je suis chiffon, je saute dans la douche avant que Cannelle ne me voie dans cet état. Stéphane disparaît faire les courses de la semaine et nous prenons le temps de nous rencontrer. Cannelle est une comédienne exilée, Stéphane lui bosse en expat’ au Ministère de l’Agriculture.

19h00 : Nous filons dans les embouteillages pour le concert : c’est Belle Duberry et David Lewis qui se produisent ce soir, la micro-formation de Paris Combo.

Si on m’avait dit !

21h00 : Fin du concert, très plaisant. Belle Duberry, son homme trompettiste David, Rémi à la batterie et Denis à la contrebasse.

21h30 : Encore la force d’aller manger avec tout ce beau monde qui se connaît plus ou moins.

Ce samedi 21 mai sera un jour sans fin, après le resto-sortie en boite de nuit (je ne comprends toujours pas comment on peut sortir en boite de nuit, j’ai plutôt la sensation de m’enfermer en boite). Les litres de Coca-Cola me réveillent mais la musique trop mal mixée aussi.

Nous sommes déjà dimanche et à 5h00 le soleil est déjà là lorsque nous sortons de cette boite et nous voilà comme à 20 ans, partis à l’aventure pour un petit-déjeuner au bord du Mékong avec Cannelle, son Stéphane, Rémi et Denis les 2 survivants de notre équipe de français en tournée en Asie, et Eric un ami franco-cambodgien de Cannelle avec qui elle monte un projet.

Comme on ne peut pas s’arrêter là, Eric nous invite pour une baignade en banlieue dans la maison de sa maman. Une grande maison de verdure que nous quitterons après la baignade pour trouver un peu de sommeil.

14h00 : A Phnom Penh, chez Cannelle et Stéphane, j’ai une chambre de princesse où je trouve enfin de longues heures de sommeil sans me faire prier.

18h00 : Centre Culturel, un lieu plus ou moins alternatif où des personnes et des organismes présentent leurs activités.

20h00 : Dîner dans un resto tenu par un français pour Cannelle, Stéphane, Eric et moi ce sera canard, avant une douce nuit de repos climatisée et méritée.

Lundi 23 Mai 2011

09h00 : Classement des photos sur l’ordi, 3 mois de photos que je ne veux pas perdre, Denis notre charmant contrebassiste de Belle Duberry a accepté de me les rapporter en France, le tout est de réussir à les graver sur un DVD. Cannelle me fait ça de son ordinateur, elle me cuisine ensuite un beau morceau de viande rouge comme j’en ai pas mangé depuis longtemps. D’ailleurs je n’arriverai pas au bout.

13h30 : Je saute sur une moto qui passait dans la rue et en 2mn je suis à l’hôtel de l’équipe qui s’apprête à conclure sa tournée autour d’un repas. Mes photos sont entre de bonnes mains, je peux respirer et m’asseoir calmement à leur table, pour partager ces derniers instants avec eux. Très plaisant de retrouver ces instants de tournée en groupe, d’autant que ce sont de très belles personnes comme je les aime.

14h30 : Bye bye

15h00 : Retour à pied chez Cannelle pour rechercher un logement et de l’inspiration pour la suite du parcours qui reste très free…

18h00 : Je sors, la nuit tombe et il fait très lourd, sans aucun doute un orage approche, il faut trouver un billet de bus avant la pluie, mais surtout avant la fermeture des offices de transport. Au moment où je conclus l’achat d’un billet pour un départ unique à 6h45 (du matin bien sur), un océan tombe sur la ville au bout d’une demie-heure la pluie se calme mais ne s’arrête pas, je décide de rentrer mais les rues sont devenues des canaux, où les 4×4 (seules voitures en vente dans ce pays) se créent des sillons sans se soucier des piétons. Pour traverser les rues perpendiculaires, obliger de mouiller la claquette et le mollet.

21h00 : Avec Stéphane nous rejoignons Cannelle à la fin du cours de théâtre qu’elle dispense à côté d’un resto pakistanais où nous dînerons tous les 3.

Ils m’ont vraiment bien soigné ces deux-là !!!

Mardi 24 mai 2011

6h00 : Clôture des bagages. Bye bye Cannelle au réveil, Stéphane m’accompagne jusqu’au bus. Bye bye Stéphane dans cette foule de départ.

06h45 : le bus du jamais-vu : un couloir de lits superposés où déjà plusieurs passagers sont installés confortablement. Voyage panoramique dans un bus rudimentaire mais spacieux.

14h00 : Frontière Cambodge-Laos, 2 dollars en plus par personne pour faciliter le passage du bus. Je me rebelle une demie minute et comme tout le monde je lâche mes 2 billets verts. Dans la zone verte on joue à la pétanque.

20h00 : Paxet : Tuk Tuk jusqu’à l’auberge, je refuse qu’on touche à ma table, c’est pas un sac de merde ! Et mon chariot il est tout neuf! Auberge, chambre à 3 dollars. Dans l’entrée un va-et-vient de voyageurs plus ou moins jeunes, occidentaux, et toujours beaucoup de femmes seules.

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