Alix Soulié

Laos

Mercredi 25 mai 2011 (Pakse)

8h

Réveillée par l’ambiance des départs de treks des courageux routards du monde entier, je m’installe dans l’accueil pour « mailer ». Ici le staff masculin est très souriant mais les nanas pas moyen d’avoir un sourire.

13h

Alimentation, traversée de la ville, Mékong, pause pour manger dans une cantine où je trouve enfin le sourire d’une patronne. Elle vient à ma table, curieuse de me voir écrire. Nous échangeons en Anglais un petit moment.

17h

Retour à l’auberge où le patron -qui n’est pas spécialement agréable mais qui a l’avantage de parler français- accepte gentiment que j’interroge sa femme qu’il traduira. J’écoute et ne relève pas certaines curiosités que je comprendrai plus tard dans mon voyage en Asie.

19h

Retour -avec deux canadiennes cette fois- à la cantine où nous retrouvons le couple avec lequel j’ai voyagé dans le bus-lit. Une bière et au lit. Je ne peux pas boire une demie-bière sans être paf avec cette chaleur.

Jeudi 26 mai 2011

7h

Internet, Skype avec Sylvie mon interlocutrice de l’association Mano a Mano de Lima, elle finit sa journée, la mienne va commencer.

8h

Départ du minibus pour le tour des exploitations agricoles et des villages du plateau que le patron m’a vivement conseillé, normal c’est son gagne-pain mais surtout, quand il m’a dit: « J’ai vécu en France et je sais ce que les Occidentaux viennent chercher ici et c’est pour ça que j’ai organisé ce tour ! », alors ça, ça m’a plus qu’intriguée. Tiens donc? Il sais ça lui !!

Au début tout va bien, visite d’exploitations de thé, vieux couple accueillant.

Après, c’est le café, sans intérêt, en plus la femme de l’exploitation n’est pas vraiment heureuse de nous accueillir, pas un sourire, pas un bonjour. Elle nous fait un café parce que c’est prévu dans le contrat.

Mais une heure plus tard, quand on doit rentrer dans une école construite grâce à divers fonds dont ceux de l’auberge, je commence à poser des questions gênantes au guide. Tous les jours un bus vient déranger la classe sous prétexte qu’ils ont payé une partie de l’école, on aurait dû apporter des cacahuètes pour les enfants

12h15

Soupe de légumes au bord de la route.

15h

J’en peux plus : nous nous introduisons dans un village où il est clair que nous ne sommes pas les bienvenus.

15h30

La même en pire : dans une cour, un groupe de touristes hébétés face à des villageois blasés sans réaction. Mes questions au guide dans le bus ont glacé tout le monde et le malaise est à présent palpable.

16h

Je craque. Je ne sors même plus du bus. C’est incroyable cette histoire.

17h

Ouf! De retour à l’auberge, je tente de me calmer et de ne surtout pas croiser le patron, sinon je vais dormir dehors cette nuit à coup sûr.

20h

Je sors enfin de ma chambre pour aller manger. Je retrouve mes canadiennes avec qui je peux évacuer cette journée terrifiante.

Une bière et au lit!

Vendredi 27 mai 2011

8h

J’attrape un bus à la volée.

« Non! C’est moi qui charge mes bagages! Cop taï lalaï! »

Un papa me colle sa fille de 4 ans à côté. Le petit bout n’est pas rassuré par ma présence. Pourtant, comme j’aime pas les enfants et surtout ceux des autres, je n’ai même pas tenté quelque approche que ce soit.

Les voyages en bus sont remplis d’images inoubliables dans ces traversées de villages, mais celle-ci est d’une grande poésie si on oublie la bêtise humaine: une femme, debout sous le soleil dans son jardin, tient dans une main un parapluie et dans l’autre un arrosoir à pommeau. Elle arrose sa terre.

Le bus s’arrête n’importe où dès qu’il chauffe trop, du coup c’est la seule occasion pour une pause pipi. Pour les hommes pas de problème. Pour les femmes à jupe et sans culotte non plus, mais pour celles à pantalon c’est le spectacle pour tout le bus, pas besoin d’aller à Aurillac !

14h

Arrivée à Savanaket. Je suis cette australienne avec qui j’ai pris le bus et que je comprends très mal dans une guest house qui est plutôt pas mal.

Nous déjeunons ensemble en ville et nos routes se séparent là. A cette heure où le soleil est très haut dans le ciel, la ville à l’architecture coloniale française est déserte. Je me laisse guider vers le Mékong où tout du long entre la route et le fleuve, des baraques abritent des petites cantines et buvettes. Un abri du soleil, des tables et des chaises, mais aussi ces grandes tables basses couvertes d’une natte où des femmes sont assemblées. Certaines assises, certaines allongées dessus avec un plat qu’elles partagent au centre. Comme je les regarde elles m’invitent à venir manger le riz avec elles. Surprise, je les remercie en leur disant que j’ai déjà mangé. Puis d’un coup derrière moi, une agitation que je n’aurais jamais imaginée. Un bateau a accosté et des hommes déchargent interminablement des marchandises. Un agent porte en mains propres des petits rouleaux de papier à plusieurs des femmes qui déjeunent là, comme des messages venus de l’autre rive. Leurs hommes seraient-ils retenu de l’autre côté en Thaïlande?

Non. Ce sont des bons de commandes.

Elles se lèvent une à une et commencent à gérer, sous l’œil attentif d’un douanier à l’uniforme beige, les marchandises que les hommes jettent au sol après avoir grimpé la berge non aménagée de ce que je découvre être l’embarcadère de cette ville.

16h

J’ai arrêté d’écrire pour regarder le spectacle, sans voir qu’un des douaniers s’était approché de moi, curieux de voir ce cahier rempli d’écritures. Il me parle en anglais, je lui répond en lao, il repart puis revient avec une jeune femme, c’est Pui, il nous laisse converser en anglais, c’est trop pour lui.

Pui a 25 ans. Elle travaille aussi dans l’import-export. C’est la fille et la sœur des deux femmes qui ont cet emplacement de buvette.

17h30

Nous parlons jusqu’à la fermeture de l’embarcadère, elle m’offre mon deuxième café frappé.

18h

A l’auberge je rencontre deux nouvelles canadiennes avec qui je pars dîner dans un resto internet car ici internet ne marche plus.

Ben oui ! Internet ! On pourrait croire que j’y passe ma vie, mais c’est un peu mon seul moyen d’avancer et je n’ai utilisé que quatre fois le téléphone en bientôt trois mois, alors que vous ? vous combinez les deux! Non?

22h

Je m’endors, excitée d’avoir trouvé cette ville où j’ai envie de me poser en attendant Vientian la capitale où je suis attendue le 5 juin.

Samedi 28 mai 2011 (Savanaket)

7 h

Petit, trop petit déjeuner.

Comme je regrette ceux de la Roumanie !

Jusqu’à 13 h : affaires courantes…

Non, je ne suis toujours pas malade. « Je touche de la peau de singe » comme disent mes amis cordistes, car ici les tables sont en béton.

14 h

Direction embarcadère, Pui m’a dit que le spectacle était tous les jours.

Madame Mépong est la doyenne des chefs de l’import-export. Elle vient s’asseoir près de moi pour lire mon cahier, puis me faire écrire sur son carnet quelques mots de son choix en français, des mots courants, des mots utiles. J’ai des sueurs, j’ai peur de mal orthographier. Bah !! elle n’en saura rien ! On lui apporte de quoi manger et elle m’invite à partager avec elle. Le douanier de la veille, achète une poche d’insectes grillés à une vendeuse ambulante et vient les partager avec nous. Me voici dans un grand manège de démonstration de cette dame sous l’œil curieux des autres femmes qui nous regardent de loin. Je mange mes premières larves de guêpes grillées.

Un mendiant : elle lui lâche un beau billet.

Deux femmes, avec l’accord de madame Mépong, nous installent sur une des tables-bancs et nous font une pédicure et manucure aux frais de madame Mépong.

Les autres femmes rient et certaines ont plutôt un regard fusillant.

Lorsque madame Mépong prend congé pour reprendre son travail elle me laisse entre les mains des esthéticiennes ambulantes.

Mademoiselle Pui fait son apparition. C’est là que je lui demande qui est cette femme.

Pui aide sa mère et sa sœur à plier boutique, je prends congé.

Il doit être 18 h , le jour commence à tomber sur la place centrale où il y a deux manèges pour les enfants. Deux vrais manèges, authentiques, faits maison, qui tournent à la force d’un ventilateur.

Je me fais violence et sort mon appareil photo. Depuis que je suis en Asie je n’arrive pas à prendre les gens en photo, je ne suis pas à l’aise avec ça. Voici une photo que je trouve jolie, je veux la montrer au modèle : une petite fille de 8 ans, une femme est avec elle. Elle porte un bébé dans ses bras et a très envie que nous rentrions en contact. C’est fait ! Très vite je me retrouve chez elle au coin de la rue, où elle m’invite car son père parle français. Il est en boucle, mais j’apprends un peu plus sur l’histoire de son pays, et surtout sur sa fille Pheng Phanh.

21h

Je finis ma journée avec madame Carole Bouillon ( ma metteur en scène) via Skype où nous échangeons sur mon avancée.

22h

Fin de journée.

Dimanche 29 Mai 2011

7h00 : Debout

8h00 : Petit-déjeuner

10h00 : L’auberge est au fond d’une impasse qui s’ouvre sur la rue menant au boulevard principal. Depuis mon arrivée tous les habitants de cette ville me saluent en lao.( » Sabadi ! « ) Mais ce matin je fais demi-tour après avoir salué ce sourire : c’est madame Sang Phet, qui tient une petite échoppe à côté du salon de coiffure de sa fille, son mari c’est papa touk touk.

Je lui prends un café glacé où elle a oublié de mettre du lait. Je prends donc mon temps et le dilue sans fin avec de l’eau qu’elle m’a offert vu la tête que je fais. Nous nous installons à la table pour une grande conversation en Lao. Sang Phet est un peu plus grande que moi, les cheveux accrochés sans coquetterie, de minuscules tâches de rousseur sur un visage souriant, elle a 52 ans.

12h00 : Une longue marche sous le soleil à la recherche du marché. La route est longue, je m’arrête prendre une soupe et un flan maison que la jeune femme vient de servir à deux garçons qui mangent à mes côtés sur la table-comptoir. Ils ont l’air d’aimer, je fais pareil. J’arrive au marché. Ah ! Les marchés Laos !

13h00 : Un jus de citron vert à l’ombre de ce marché.

15h00 : Une heure de marche sous le soleil

16h00 : Sieste longue…

18h00 : Soupe en ville, connexion…

22h00 : Fin de dimanche

Lundi 30 Mai 2011

10h00 : Après un salut à Mme Sang Phet, je découvre la ville au bord du Mékong et ces marchands alignés au bord de la route. Une brochette, une boisson

13h00 : Embarcadère, Pui n’est pas là, un café glacé.

15h00 : Un autre coucou à Sang Phet avant de rentrer

18h00 : Dîner à l’auberge, Skype avec Flavie en direct de Marseille.

Mardi 31 Mai 2011

10h00 : Je passe voir Pheng Phanh, son papa et son nouveau né qui dort

13h00 : Je mange un plat de pâtes au riz

14h00 : Entretien avec Sinakhone, une jeune femme lao qui est responsable de l’office écotourisme, encore un beau portrait et une femme qui en veut pour son pays.

15h30 : Embarcadère, je salue tout le monde car je pars demain c’est décidé, quel salut Pui de ma part

17h00 : En revenant chez Sang Phet pour commander la course de papa touk touk qui nous mènera au bus ma table et moi demain matin, je m’arrête près de la rivière dégueulasse où je passe tous les jours à pied. Sur un petit pont jouent les gamins que je côtoie tous les jours depuis mon arrivée. Les grandes ados tentent de faire des photos avec l’appareil que je leur ai confié. Petite récré, je les salue et file chez maman Sang Phet.

18h00 : Après avoir convenu de la course de touk touk pour demain matin (à la hausse bien sûr), Sang Pet veut me garder à manger, nous partons toutes les deux en scooter pour faire quelques courses.

19h00 : Nous mangeons tous les trois à la table de la boutique où les clients viennent tour à tour pour échanger quelques mots avant de repartir. Sang Phet nous confie une mission pour octobre, je dois contacter pour elle une amie lao qui est parti vivre en France.

20h00 : Retour à l’auberge, devant l’accueil un touk touk est garé dans la nuit : Gema est assise dedans, nous avions sympathisé à Paxet au cours de la virée en bus où je m’étais indignée. Ce soir la guest house est complète, je lui propose de partager mon lit, la voilà soulagée. Je n’ai toujours pas compris sa nationalité. Néo-Zélandaise peut être? Mais j’en doute car je comprends très bien ce qu’elle me dit en anglais.

Mercredi 1 er Juin 2011

Après une nuit orageuse comme jamais -souvent réveillée par des éclairs qui m’ont fait bondir- le réveil sonne à six heures. Je l’éteins pour ne pas réveiller ma camarade de chambre, et bien sûr je me rendors.

6h10 : Dans un sursaut de lucidité je bondis du lit, mais pour une fois mes bagages sont prêts.

Bye bye Gema !

6h30 : Papa touk-touk vient me chercher avec son sourire que j’aperçois à 50 mètres au bout du chemin de terre. On charge les bagages, nous quittons cette grande cour au petit matin, puis il stoppe sa course à la boutique de Sang Pet pour un bye bye sourire.

6h38 : Gare routière, bye bye Papa touk-touk.

7h00 : Le bus pour le nord est chargé de frigidaires et de moustiques. Je suis la seule occidentale sur 50 personnes à bord. Je sors ma raquette pour griller les moustiques, ça fait rire tout le monde, puis on se la fait passer tellement le bus est infesté. L’ambiance est très drôle. Les Laos ont un humour incroyable. 3h de route et pas une pause-pipi, j’escalade les frigidaires de l’allée centrale et supplie le chauffeur de s’arrêter. Il me répond que nous arrivons à Tatek dans 5 km. Au secours, c’est pas humain !

10h15 : Arrivée à Tatek, ouf ! Je saute du bus en abandonnant bagage et table.

« touk-touk ? », « touk-touk ? » , « touk-touk ? » , « touk-touk ? » , « touk-touk ? »

« Non merci ! », « Non, merci ! » « Bo cop taïl ! Je vais manger une soupe d’abord et puis j’irais en ville à pied après. »

Les messieurs touk-touk me prennent pour une folle. Ils me répètent en boucle : « 4 km Tatek ! », « 4km Tatek ! »

« J’ai le temps pas de problème… »

11H00 : C’est parti pour 5h de marche à la recherche d’un endroit pour me poser. Avec des touk-touks qui me proposent leur services et qui baissent les prix à chaque km gagné.

16h00 : Après une dizaine de rencontres surprenantes, guest-house, douche, envie d’être sur les mains, cette marche m’a revitalisée.

20h00 : Je suis (d’humeur ?) cavalière et je propose à un François de passage de m’accompagner dîner en ville.

22h00 : Je profite du fait que tous les voyageurs se douchent et se couchent pour investir le couloir pour une séance d’équilibre. Je ne me suis pas mise sur les mains depuis la Moldavie.

Dans le dortoir, tout le monde dort, je me suis installé une moustiquaire que tout le monde m’envie. Bonne nuit les moustiques !

Jeudi 2 Juin 2011

07h00 : Je me réveille en sueur, les matelas sont plastifiés au cellophane que j’ai déchiré dans la nuit, avant de replacer le drap et de me rendormir.

07h30 : Je regarde les touristes partir à l’aventure. Un peu d’écriture.

12h00 : Promenade dans la ville, marché, deux brochettes de je ne sais quelle viande.

13h00 : Je prends la route en direction du Mékong.

15h00 : Une vieille femme en robe modifie un tas de sable devant une maison en construction. Je la regarde puis lui propose de prendre le relais, sa fille, une femme de mon âge, arrive et nous rassemblons le tout à nous deux.

16h00 : Comme je marche sur cette route à la recherche du Mékong, je vois derrière la fenêtre d’une officine médicale une femme que je salue (au Laos, on salue tout le monde, même dans leur maison). Puis je stoppe mes pas, cette femme semble être un docteur qui attend son malade. Allez ! Avec un peu de chance, elle parlera Falang !

Elle me fait signe de rentrer :

– Bonjour, excusez-moi, parlez vous français ?

– Un petit peu, me répond-elle.

Une voix d’homme :

– Moi je suis français, mais ma femme le comprend et le parle un peu.

Une femme prés de nous est en séance d’acupuncture. Je leur fais part du but de ma visite, et je ne serai pas déçue de ces deux heures de discussion avec cet émouvant jeune couple mixte de 52 et 62 ans. Ils répondront à la plupart des questions et mettront au clair les différentes situations que je ne m’expliquais pas depuis mon arrivée en Asie. Un homme entre, un patient. Je m’éclipse et reprend ma route, mais il fait sombre. Je rentre sans avoir vu le Mékong, je m’achète une chemise pour mes épaules nues. Épuisée et affamée, j’arrive à l’auberge envahie de touristes.

Je traverse cette foule agitée et jette mon sac sur mon lit de dortoir. Et là, sur le lit qu’occupait mon voisin François, une Jema au sourire anglais est assise. Elle écrit, ça me semble normal de la retrouver là. Je ne suis pas loquace, bonne nuit.

Vendredi 3 Juin 2011

Dans le dortoir les réveils sonnent les uns après les autres, mais le soleil, lui, est là depuis plus d’une heure. Je le regarde réveiller tous ces corps dans sa lumière que modifient les persiennes à demi-fermées. Le tulle de ma moustiquaire rajoute à l’aurore une dimension de jamais-vu (j’aurais pu citer un auteur classique français tant cette scène était belle, mais je ne connais pas la littérature française). Des corps de femmes, des corps d’hommes, impudiques.

Je vais prendre une soupe de légumes avant de me décider. Jema et les autres louent leur 110 cm cube pour leur trek-trip de 4 jours. Jema m’embrasse, le contact me surprend. Enfin… surprend mes capteurs sensitifs. Depuis Phom Pen, les contacts physiques sont quasi inexistants.

09h00 : Je plie mon sac et en descendant la Table avec mes claquettes neuves, je loupe les deux dernières marches, immenses et démesurément hors-norme. Ma cascade de bon matin fait son petit effet auprès des voyageurs embrunchés (ce dernier mot vous est offert par le dictionnaire du petit Alix illustré 2010-2011)*. Tout va bien, je maîtrise. Hey ! Cirque !

Touk-touk pour 5 km, bus. Je suis tout au fond du bus et après cette longue discussion avec Serge et sa femme, je comprends mieux certains comportements que je me refusais d’interpréter comme une occidentale. Et à présent tout est plus lisible. Et il y a ce mot Falang qu’ils pensent que nous ne comprenons pas, mais qui en dit beaucoup lorsqu’on les entend ricaner entre deux Falang.

Tout est si complexe.

Ces gens qui me sourient, pourquoi ?

Ces gens qui me snobent…

Ceux qui disent « Niam niam » avec un regard illuminé par mon apparition…

Le bus s’arrête à l’entrée d’une ville. Je demande à mes voisins si c’est l’arrêt Paksan (en Laos bien sûr Flavie). « Oui oui ». En descendant, un homme me le confirme, mais comme je suis la seule à descendre, je vois bien que le mec me prend pour un con dans des explications bidons pour m’arnaquer en me proposant un touk-touk, tout ça en Anglais. Là, c’est moi qui le prends pour un con en lui disant que je suis déjà venue et que la gare, ça n’est pas ce trottoir ou des hommes sont en train de décharger du toit du bus un stock de cartons. Je lui dis en boucle avec colère « Dollar, dollar, dollar ». Avant de remonter dans le bus quelques femmes me font signe timidement que c’est bien plus loin.

15h00 : Sous le soleil, une grande gare routière et un marché couvert qui sont en général au même endroit au Laos. Le monsieur touk-touk ne sait pas ou est la guest-house que j’ai relevée sur le Daily Planet de mon camarade François.

Bon, ben, je vais voir plus loin. « Un café glacé s’il vous plaît madame !». « Falang, falang, là-bas à la table, falang ». « La falang veux un kafé nom avec nam kone ». 20 mètres plus loin, pas besoin de commander, la commande a été prise à distance. Je dois être la seule falang à des kilomètres alentour. Assise à cette grande table, pour la première fois, sous l’ombre de ce marché couvert où la lumière ne rentre que par les côtés, je voudrais ne pas rester seule. J’ai la sensation d’attendre une personne à qui j’ai donné rendez-vous, et que bientôt, sur les entrées du côté, je verrai sa silhouette familière qui me rejoindrait un instant pour prendre un café, et qu’ensemble nous partirions à la recherche de cette guest-house que personne ne connaît ici. Comme je perçois ton ressenti Diakaridia, ici je suis blanche comme toi tu es noire à Paris. Je fais même peur au moins de 20 mois lorsque leurs mamans me montrent du doigt en disant « Regarde falang ».

Après la discussion avec Serge, je comprends pourquoi les hommes me regardent au point de venir prendre mon cahier où je suis en train d’écrire, pour comprendre ma folie. Ici, quand on lit trop, ou si l’on a une activité littéraire, on est considéré comme étant au bord de la folie. Ici, il est plus correct de rester assis sans rien faire ou de jouer aux cartes.

Six femmes viennent prendre place à mes côtés pour manger leur soupe. « Falang bla bla hi hi »… Après un long moment, elles s’adressent à moi directement pour me demander mon âge. Nous plaisantons quelque temps en Laos, puis lorsque le fils de Mme Kafé vient me parler avec quelques mots d’anglais, toutes les femmes disparaissent. Comme je lui fais une leçon de français et lui une leçon de Laos, j’en profite pour lui demander le prix des deux cafés que je viens de prendre. Attendri par cette discussion, il m’annonce le vrai prix : 2000 kips pour un, donc 4000 les 2. Je lui tends un billet de 10, il revient en s’excusant après une discussion fâcheuse avec sa mère. Il m’annonce que finalement c’est 5000 le tout. Je lui réponds bien sûr avec le sourire « Oui falang ». Depuis une semaine, je paie mon café deux, voire trois fois le prix. Je connais à présent le pourcentage de mes arnaques quotidiennes.

La pluie tombe comme elle sait si bien le faire ici. J’attends la fin et me décide à aller livrer mon destin au premier touk-touk de la gare routière.

15000 kip, je dis non, 10000, et on est partis dans cette guest-house qui n’est pas celle que je voulais. La personne qui glisse au monsieur touk-touk un billet de remerciement parle français et me montre sa dernière chambre libre, qui est à la hauteur du prix : très élevé.

18h00 : Dans cette ville, pas d’Internet. Ah si ! Mais que demain matin. Ça tombe bien, je suis en week-end. Je vais en tongs glissantes à la recherche du Mékong. Deux kilomètres sous une fine pluie. Une grande cantine au bord de l’eau. Je n’ai pas soif, je n’ai pas faim. Je prends une bière et une grosse soupe que je laisse réchauffer et refroidir. Le service est fait avec le sourire d’un jeune catoy (3ème sexe) en jupe traditionnelle mauve, un chignon noir relevé et quasiment pas de maquillage.

23h00 : On me fait comprendre que c’est la fermeture en faisant clignoter les lumières. Je n’ai quasiment pas touché ni à ma soupe, ni à ma bière, et quand je vais pour payer, wow ! c’est cher payé la bouchée. La route qui me ramène à ma chambre n’est pas éclairée. Seules dans le fossé scintillent des lucioles volantes. Comme dans les films de Miyazaki. Des chiens m’aboient dessus pendant deux kilomètres.

Je m’enferme dans ma chambre.

Je ne sais pas pourquoi je me suis arrêté dans cette ville.

Elle était sur ma route…

Samedi 4 juin 2011 (Paksan)

8 h : Réveil nature

9 h : Petite boutique internet, la seule

10 h : Une soupe : on m’installe sur une table collée au mur toute en longueur. Aux fourneaux ça parle sur moi, bien sûr, et ça ricane, ce qui agace le petit adolescent assis derrière moi qui imite d’un air stupide le ricanement de sa mère en jouant avec un pantin sur ressort.

11 h : Je me casse d’ici où je ne me sens pas la bienvenue. Quand je le dis au propriétaire de l’auberge, qui parle très bien français, il n’est pas surpris par mon ressenti. D’ailleurs dans les guides cette ville est citée très rarement.

14 h : Comme j’arrive sur la grande route avec mon chargement pour rejoindre la gare a pied, un énorme bus me klaxonne et un homme saute sur la route et me dit :

«  Vientian ?

– Oui, oui, combien ?

– 30 000 kips (4 $)

– Ok ! »

Ouf ! Je me suis crue un instant dans « La mort aux trousses », je n’aurais pas voulu rester ici une minute de plus.

15 h : Nous sommes à 9 km de Vientian, à la gare routière. Au Laos, elles sont toujours excentrées des villes.

Touk-touk collectif pour rejoindre le centre, nous sommes 10 et le chauffeur nous dépose les uns après les autres à l’adresse indiquée au départ.

Les gens sont très discrets et ne nous regardent pas trop. Chacun semble soucieux de choses lourdes à porter, mais lorsque le touk-touk s’arrête à l’adresse que je lui ai indiquée, le temps que je sorte du fond du véhicule j’entends monsieur touk-touk qui violente mon chariot et ma table sur le toit. D’un bond je me retrouve sur le toit pour décrocher la roue du chariot qui prenait un mauvais pli.

– Voilà je m’occupe de tout !

– 10 000 kips

– Non !

– 15 000 ? Ok !

Me voilà avec tous mes bagages aux pieds et quand je relève la tête en direction du touk-touk toujours garé, une grappe de visages est rivée sur moi comme s’ils portaient un masque, le menton en avant, ils ont tous le même regard qui me fait penser qu’il y a un problème.

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

Leurs visages restent identiques comme hallucinés, peut être mon élan sur le toit ou mon chargement les interpelle. Et le touk-touk s’en va avec leurs visages figés qui deviennent de plus en plus petits mais qui ne décrochent pas .Juste le katoy (3ème sexe) installé a l’arrière-droite répond à mon sourire mais son regard reste figé.

16 h : Juste à traverser l’avenue Xan Lang (les Champs Elysées de Vientian au bout duquel il y a bien sûr l’Arc de triomphe) et me voici au Centre Culturel Français.

Poste de garde, un sourire ; des enfants s’agitent devant la bibliothèque. Ils parlent ma langue au naturel. Je dis « Sabadï » on me répond « Bonjour » et quand je dis « Bonjour », on me répond « Sabadï ».

J’avance doucement et je découvre de grands bâtiments de salle de classe qui encadrent un rectangle de verdure, il ne manque plus que la piscine face à la terrasse du café où je me pose le temps de boire un café glacé.

17 h : J’ai trouvé une solution avec le personnel du centre présent ce samedi pour stocker ma table. Armée de ma Delsey rouge et mon sac allégé de 10 kg d’acier, j’entre dans cette guest-house sombre, pour une chambre a 60 000 kips sans fenêtre, sans prise électrique, où la poussière n’a jamais été faite, et je doute du linge de maison.

Le centre culturel m’a réservé une chambre ailleurs mais j’ai 1 jour d’avance.

17 h 30 : Connexion

18 h 30 : Retour au CCF (centre culturel Français) pour la séance de cinéma.

19 h : « La raison humaine » avec Amalric.

Waouh quelle soirée glaciale, malgré les 35°c qui étouffent la ville. Nous venons de traverser un froid polaire dans cette salle où en plus de la clim excessive, le film qui nous a été projeté finissait de nous glacer le sang.

20 h 30 : Débriefing avec un jeune couple de français, Léone et Clément avec qui nous partons pour nous poser en ville car il faut que j’échange sur ces derniers jours. Comme ils ont beaucoup voyagé en Asie du sud ils comprennent ma demande. Léone vient de prendre son poste à l’université de Vientian et sera en quelque sorte coordinatrice des profs de français. Posés dans un café branché, nous assistons aux petites fantaisies nocturnes que s’accordent les petits-bourgeois de Vientian avec leurs autos et leurs motos. Des courses-poursuites en centre-ville en toute impunité.

22 h : Nous rentrons chez nous avant la pluie.

Dimanche 5 juin (Vientian)

J’ai écrit toute la nuit et fumé un paquet de cigarettes en entier que je me suis acheté dans la soirée.

12 h : La tête enfumée, je plie bagage et sors de ce trou-à-rats pour aller manger. Avant de partir je demande quand même de visiter les chambres à 70 000 kips, et je découvre pour 10 000 kips de plus une superbe chambre avec fenêtre et clarté ! Bon ! Si je dois revenir, ce sera là.

12 h 30 : Un endroit pour manger et se connecter.

14 h : Skype papa-maman. Depuis la Roumanie je n’avais pas vu ma mère qui me rappelle que c’était la fête des mères la semaine passée.

Je lui réponds « Alors c’était sympa ? » !!!

18 h : Nouvel hôtel, bon finalement le CCF prend en charge la totalité de mon séjour et me voici contrainte à rester dans cet hôtel avec clim et piscine.

19 h : A deux pas d’un marché, l’hôtel est un peu loin du CCF mais l’endroit est charmant : brochette de poulet, riz mong (riz collant que l’on roule en boulette dans la paume de la main).

20 h : Piscine.

21 h : Au lit.

Lundi 6 juin

7 h : Piscine

8 h : Arrivée au CCF, tentative de petit-déjeuner, envie de rien.

10 h : Rencontre avec les responsables du CCF pour les formalités, très bonne surprise : ils prennent en charge l’hébergement et les défraiements pour mon séjour à Vientian.

11 h : Emilie ma correspondante via internet, enfin un visage, un visage qui rentre de vacances et qui fait plaisir à voir. (Je ne suis pas fatiguée mais je me sens très mal, mes mains tremblent comme une très forte angoisse qui n’a pas raison d’être). Nous faisons un point sur le séjour et l’organisation du planning des différents ateliers.

14h : J’accueille les premières filles dans la salle de théâtre, elles se sont faites toutes jolies et ont mis leurs plus belles jupes (traditionnelles droites avec une frise dorée sur le bas).

« Bon bien on va faire simple aujourd’hui, j’adapterai, pas de problème ! »

Elles sont très jeunes, entre 19 et 24 ans, elles sont encadrées par Isabella, mon interlocutrice via internet, qui restera à la première partie de la séance pour traduire mon français en anglais. L’animatrice-éducatrice-accompagnatrice de cette association de femmes en réinsertion suite à du trafic sexuel traduira de l’anglais au lao.

Lien : http://www.afesiplaos.org

Cette séance est très sportive, surtout quand Isabella s’en va, vient le moment de parler seulement en anglais.

Ce que je demande les fait halluciner et au début elles pouffent discrètement par incompréhension, puis quand elles ont compris les règles du jeu nous commençons à communiquer dans un langage universel.

16 h : Fin de l’atelier. Je viens de réaliser et de confirmer mon changement de continent, ici les corps ont un autre langage, les difficultés et les facilités de se mouvoir ne sont pas situées aux mêmes endroits du corps en Europe et en Asie.

16 h30 : Attablée sur mon ordi, je tente de déjeuner, mais rien, je n’ai pas d’appétit.

19 h : Retour a l’hôtel.

20 h : Comme je fais des allers-retours dans la piscine, j’entends à la table de la terrasse qu’on parle français. Deux hommes entre 50 et 70 ans en charmante et jeune compagnie locale. Le plus vieux reçoit sur son ordinateur ouvert un appel Skype, c’est sa femme… Quelle maîtrise, quel talent !

21 h : Édition du blog.

21 h30 : Je m’endors sur l’ordi avant la validation, tout sera à refaire.

Mardi 7 juin

Réveil avec les travaux. Je reprends là ou j’en étais avant de m’endormir, plus les affaires courantes.

Non je ne m’arrête pas ! Mais qu’est-ce que je pourrais faire d’autre à 7h du matin, je ne peux même pas me faire couler un café ou me faire cuire un œuf.

Même si je préférerais frotter le dos d’une bonne âme endormie prés de moi ! Voila mes vacances !

10 h 30 : Petit-déjeuner sur la route sur une table napée de carreaux rouges et blancs, la préparation est jolie mais ça ne passe toujours pas. Je sens mon pouls dans ma gorge comme si j’étais revenue à 20 de tension.

11 h : Voila je trouve enfin un lavoir pour laver mes 2 kg de linge pour 30 000 kips

13 h : Waouh ! Ça ne va pas du tout. Posée sur mon ordi dans le café du CCF, je tente d’avoir des conversations qui se tiennent. Emilie me présente une équipe de musiciens à vélos géants, ils sont sur les routes depuis 2 ans.

Site : www.monkeyband.tk

www.2wheels4change.com

16 h : Gema « l’incrédible » qui me retrouve toujours bien au CCF comme promis. (Gema est la grande anglaise de pakset de Savanaket et de Tateket.)

17 h : La salle est libre, je tente une montée de table, mais mon état est mortellement dangereux, ½ heure d’agitation sous la surveillance de Gema et de Ballaque (la musicienne des vélos géants), puis comme ça les démange, je leur prête ma table.

18 h : Avec Gema nous nous arrêtons sur le marché pour trouver notre dîner.

18 h 30 : Pour moi simple riz collant au bord de la piscine.

19 h : Piscine.

20 h : Nous regardons sur Google maps la distance entre la maison de vacances dans le Limousin et celle de mes parents. Gema retourne à sa guest-house, elle veut assister à l’atelier de demain après-midi, je lui propose de faire les prises vidéo et les photos.

23 h : Fin.

Mercredi 8 juin

7 h : J’ouvre les yeux, deux pas dans la salle de bain, deux pas dans mon maillot de bain, vingt pas jusqu’au bord du bain, je plonge…

8 h : Cafétéria du CCF, café.

9 h : L’association est de retour pour l’atelier, mais les filles ont changé, elles sont plus jeunes, bon ben… C’était pas prévu, on s’adapte, quoi faire d’autre… Allez hop, je m’adapte, elles ont entre 14 et 19 ans. Tout se passe dans les meilleures conditions, mon anglais est simple mais nous nous en sortons très bien. L’animatrice-éducatrice-traductrice a une prise et une complicité incontestable avec les filles.

11 h 30 : Les filles reviendront toutes vendredi pour le dernier atelier. Je ne comprends pas bien « elles reviennent à 20 du coup ? Bon ! Surprise ! On verra. »

12 h : Rencontre des falangs expat’ qui déjeunent en terrasse.

13 h : Monsieur Censure du Laos du ministère déjeune à ma table où je tente de boucler le blog qui n’en finit pas.

14 h : Gema arrive pour filmer et prendre des photos de l’atelier.

15 h : Le nouveau groupe arrive, elles sont de l’école de musique de Vientian dans la section danse traditionnelle lao. Ce groupe est plus rapide, plus réactif, leur traductrice a, je pense, un niveau juste au dessus du mien et pourtant elle me comprend parfaitement. Curieusement les danseuses ont plus de raideur dans le corps que les filles de ce matin. Par exemple : difficile de faire le dos rond, déformation professionnelle me dit la traductrice. Je m’agite dans tous les sens pour me faire comprendre.

Au fond de la salle, Gema mon professeur d’anglais me fait des signes et me dit que ce que je raconte est correct.

17 h : Nous allons enfin voir le Mékong avec Gema avant le coucher du soleil. Un plat de nouilles blanches aux fruits de mer. Ces deux ateliers dans la journée m’ont redonné l’appétit.

20 h : Bye bye Gema ! Je la dépose à sa guest-house tout près du Mékong et je pars pour une traversée à pied du centre-ville dans la nuit.

21 h : Ordi, au lit !!

Jeudi 9 juin

8h: Piscine, petit-déjeuner.

10h: Travail sur table, seule, dans une salle de classe du C.C.F. Le moindre mouvement devient incertain, je reste dans mes marques, je n’avance pas vraiment, je consolide. Même avec la climatisation je m’essouffle, je réapprends surtout à manipuler le costume.

13h30: Un café glacé.

14h: Deuxième atelier avec les danseuses, de très belles surprises.

16h: Un peu de « table » toute seule dans cette salle de spectacle agréable.

17h: Sabine me tape une bonne partie du blog jusqu’à ce que le café ferme à 21h.

21h30: Je m’allonge sur ce grand lit : je pourrais recoudre mon costume, je pourrais faire mes comptes, classer mes tickets que je n’ai pas scotchés dans mon cahier des comptes depuis la Hongrie, je pourrais sélectionner les photos du Cambodge et du Laos pour le blog, je pourrais rattraper mes pages d’écriture pour être enfin à jour, je pourrais ouvrir mon carnet des urgences et revoir point par point ce qui urge, je pourrais allumer ma connexion et flâner sur Skype, je pourrais écrire des mails à toutes les bouteilles lancées sans réponse, je pourrais mettre à jour le site et corriger les anomalies, je pourrais rédiger les courriers en attente, je pourrais aller nager dans la piscine, je pourrais consulter les offres d’emplois sur le site de pôle emploi et les sites spécialisés pour anticiper mon retour, je pourrais retoucher mon C.V, je pourrais faire un point général, je pourrais… Mais non ! Je suis allongée sur ce grand lit, j’ai allumé T.V.5 monde qui diffuse un mauvais téléfilm sur une vieille télé où deux fréquences se mélangent, et j’attends le sommeil.

Vendredi 10 juin 2011,

7h: Piscine.

8h : Petit-déjeuner au bord de l’eau bleue, ici l’accueil est vraiment charmant.

8h45 : Je récupère mon linge à la laverie.

9h : C.C.F. La salle de spectacle est prise et ma table est enfermée dedans, bon ben je vais m’installer au bar et commencer tout ce que j’aurais pu faire hier soir.

12h-13h30: Manipulation du costume sur ma table

13h30 : Les filles du premier groupe n’arrivent pas…

14h : Elles arrivent mais la salle est prise par un groupe de théâtre d’enfants. Nous prenons une salle de classe moins chaleureuse mais aussi grande. J’obéis. J’apprécie vraiment les ateliers, les changements et les contretemps ne me contrarient même pas. Mais bon, là j’aimerais rentrer tous les soirs dans un chez-moi pour pouvoir cuisiner, laver la vaisselle et retrouver mon lit défait de la veille, changer et varier ma tenue vestimentaire, nettoyer mes chiottes, passer l’aspirateur, installer des étagères où il en manque, couper ma haie, couper du bois pour cet hiver, installer un nouveau poêle à bois.

Ben non! Tu obéis et t’attends que ça passe. Oui il y a des jours où j’attends que ça passe. Bon plutôt des heures. C’est quand même stupide sept mois, j’ai parfois l’impression de perdre mon temps, comme dans une mauvaise histoire d’amour où il y a plus de temps morts et de souffrances que de merveilleux moments.

16h : Nous faisons le point avec les filles pour la présentation de lundi.

17h : Ordinateur, écriture avec Sabine que je suis en train d’épuiser.

21h : Riz sur la route.

22h 30: J’ai rendez-vous avec Raphaël via Skype, après les affaires courantes de l’asso nous avons une grande discussion. Difficiles toutes ces relations à distance, il y a des incompréhensions dues sans aucun doute au climat et au décalage horaire. J’ai très envie de donner congé à tous les Anomaliques. Raphaël a cette grande force de me remettre les idées en place.

« – Bonne nuit!

– oui bonne nuit. »

Samedi 11 juin 2011

6h : Réveillée par un moustique qui s’acharne sur moi. Il n’y en avait pas jusqu’à aujourd’hui. Bon, impossible de me rendormir vraiment.

7h45 : Salle de bain, maillot de bain, piscine.

9h : Petit-déjeuner. Autant dire que j’ai nagé une heure.

0

10h : C.C.F. Je m’installe dans une salle de classe pour deux jours de travail seule.

12h : Bon ! Il faut que je répare ce costume, et que j’y rajoute des astuces. Me voilà dans un grand marché à deux pas du C.C.F. Il y a de tout sauf une mercerie. Après avoir tourné en rond, je demande une mercerie en langage des signes à deux marchandes qui déjeunent sur leur stand. Une passante qui les entend me prend en charge pour me guider.

– Voilà !

– Cop taï laï laï Madame.

13h : Installée à la terrasse animée du C.C.F., je répare mon costume en mangeant du riz cantonnais et en regardant les infos de Toulouse.

13h30 : A table ! J’y retourne. Je tourne en rond. Je ne suis pas productive. Grrrrrrr. Je suis d’humeur râleuse. Qu’est-ce que je fous là toute seule ? Je déteste travailler seule ! Je ne suis pas assez démontée du cerveau pour donner une âme à ma table et imaginer que nous sommes deux. Il faut que ce soit la prochaine étape, sinon c’est pas la peine de continuer.

16h : Pause café à la terrasse. Les Monkey Band sont connectés. Bruno le français me parle en anglais, Ballaque l’allemande en français, et Tyle l’américain est sur son tour d’ordinateur et ne me parle pas. Je prête mon ordinateur à Ballaque et je retourne à ma table.

19h : Emilie passe me faire un coucou.

19h30 : Stop. Je n’arrive à rien. J’ai avancé de 5 cm sur mon travail, ça va pour aujourd’hui ! Je vais aller réfléchir dans ma tronche des mauvais jours. Je retrouve la petite Ballaque et Bruno au bar du C.C.F., il n’y a plus que nous jusqu’à la fermeture. Ballaque profite de la dernière goutte de connexion avec mon ordi, j’hésite à partir dans mon hôtel, j’hésite aussi à lui donner mon ordi. Oui, tiens, je suis sûre que ça lui ferait plaisir !

« Bah ! Allez, va te calmer dans ta chambre. »

20h30 : J’avale sur la route deux chaussons à la viande et aux oignons, et me brûle le palais, une banane noircie qu’il me reste dans mon frigidaire, et une gorgée de ce miel que j’avais acheté sur la route de Pakset dans le sud du Laos, le temps que la mangue que Gema a rangée dans le congélateur (je ne sais pourquoi) décongèle.

Je reprends plus sérieusement mon travail sans râler et tente de comprendre pourquoi je suis là.

00h00 : Des évidences me reviennent, mais je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est une idée stupide.

Sept mois! Pffff…

Bah ! Allez, je m’endors.

Dimanche 12 juin 2011

8h : Il pleut, piscine, j’ai bien dormi. Comme tous les matins je rejoins le C.C.F. par la même route, 20 minutes de marche ; ce matin comme hier c’est spécial, c’est le week-end ; tout le monde fait son grand ménage dans tous les bouis-bouis. Dans toutes les maisons l’agitation est là.

Mon énergie est bonne, j’ai envie et mon corps aussi.

10h : Le théâtre est occupé par To un artiste lao et son équipe qui répètent un spectacle de marionnettes et d’objets. Les Monkey Band sont là tous les trois pour les accompagner en musique. Je les regarde un peu avant d’aller m’attabler. De voir les autres travailler, ça me donne envie.

10h30 : Salle de classe. Pas de clim, pas de ventilation, pas d’électricité, c’est dimanche. Le moindre effort et je me noie dans ma sueur, je glisse, les yeux me piquent. Je manque de me décapiter avec la pale d’un ventilateur éteint, ma table est trop haute. Heureusement pas d’électricité. Malgré tout j’ai envie et j’avance.

13h : Les vélocipèdes me rejoignent sur la terrasse du café déserté, fermé en ce dimanche. J’installe mon espace pour la soirée de présentation de demain que le centre a organisé. Les filles seront accompagnées des musiciens à vélo pour présenter ce que nous avons entamé cette semaine. Sur la terrasse l’ambiance est au travail, eux revoient leur répertoire musical, moi je tente de contrôler mes mouvements sur ce mur glissant avec la peau qui ruisselle.

14h : Bruno est de corvée sandwich, je fais la pause avec lui. L’occasion de sortir en ville avec le vélo géant que Ballaque m’a prêté. Sur la route du marché, toutes les mâchoires se décrochent. Leur vélo, c’est deux vélos superposés et soudés, avec des chaînes plus longues. Il faut juste courir pour monter dessus et sauter pour en descendre. Pour s’arrêter au feu, eh bien il faut poser le pied ou la main sur le feu pour pouvoir rester en équilibre. Bruno est donc français, et depuis deux mois ils ne sont plus que trois dans l’équipe qui se modifie tout au long de leur parcours. Ma présence lui permet de faire un break avec ses camarades. L’épuisement est palpable. Ben, bien qu’aujourd’hui je sois motivée pour travailler, mon humeur reste maussade. Nous voici donc comme deux français râleurs et en plein questionnement sur leurs voyages respectifs.

Si je reste un jour de plus, je pourrai jouer avec eux dans la rue. Ok, c’est conclu.

15h : Déjeuner avec les trois dans le jardin du C.C.F. qui n’est plus qu’à nous.

15h30 : Pour digérer, nous allons voir en vélo l’arc de triomphe juste à côté où Serge de Tatek m’a dit qu’il y avait d’énormes essaims d’abeilles suspendus sous l’arche. Avec nos grands vélos, nous devenons l’attraction des touristes laos et autres. En effet, d’immenses oreilles d’essaims d’abeilles sont suspendus et vibrent dans le vent et dans l’agitation des travailleuses, là, au dessus de nos têtes, à 10 mètres, sans que personne ne le sache et ne le voie.

16h : La pluie arrive enfin, le temps se rafraîchit et nous reprenons chacun notre travail.

19h : J’invite Bruno pour la piscine et la connexion de l’hôtel, je m’excuse auprès des deux autres, mais je doute que la patronne apprécie d’être envahie par une équipe de routards, soyons lucides. Sur la route, nous mangeons une soupe. Cette fois je ferai le voyage sur le porte-bagage de Bruno. Tout le staff de l’hôtel est hilare de notre entrée. Après la piscine, je me connecte le temps de lire un mail qui me redonne la force et le sourire, puis donne la connexion à Bruno qui passera la nuit avec son amoureuse australienne qui vit à Berlin, via Skype. L’hôtel ferme ses grilles avec le vélo géant enfermé dans la cour. Je m’endors avec le sourire et cette voix à l’accent du Lot qui parle anglais.

Lundi 13 juin 2011

7h : J’ai si bien dormi, je suis en pleine forme. Bruno, lui, a dû s’endormir il y a une heure ou deux dans un coin du lit.

7h10 : Je vais nager pour ne pas le saouler avec ma bonne humeur.

9h : Le staff de l’hôtel pouffe de rire en nous voyant partir sur ce vélo, mais surtout en imaginant que ce garçon a passé la nuit dans ma chambre ! A croire qu’ils sont moins surpris de voir des français qui s’envoient des putes de 35 ans de moins qu’eux, que moi qui reçoit un petit vagabond du monde sur sa bicyclette.

10h : Il me dépose au C.C.F. et rejoint ses camarades dans une école où ils font une intervention musicale avec des tout-petits. La terrasse du C.C.F est occupée par les falangs attablés, je n’y pourrai plus travailler jusqu’à ce soir dans les conditions de présentation.

13h : Retour des musiciens. Petit briefing sur ce que j’attends d’eux ce soir.

13h30 : Toujours pas les filles.

14h : Toujours pas les filles : mon ordi ne répond plus, les lettres se bloquent.

15h : Je reste calme, les filles du 1er groupe arrivent enfin. Nous préparons avec les musiciens leurs deux passages de 3mn (puis elles repartent).

17h : Toujours pas les filles du 2ème groupe !

18h 30: Toujours pas les filles du 2ème groupe !

18h 40 : Ah ! 1, 2, 3, 4 filles ok 5 filles pour 3 mn de présentation préparées en 5mn !!

19h : Toutes les filles sont de retour, c’est moi qui ouvre les festivités, accueillie par les Monkey band.

Heureusement qu’il ne pleut plus il y a plus de 70 personnes dans le café, jusque dans la pelouse.

Les filles sont rayonnantes et si heureuses de participer à cette soirée.

Je leur restitue mes deux petites scènes dans une chaleur glissante et étourdissante.

A la fin les filles de l’école de musique nous offrent une danse trad Lao, enfin un mix de danses en costume de différentes régions du Laos. Je retrouve toutes les filles dans nos loges improvisées dans une salle de classe pour une séance photo et surtout une séquence émotion. Elles sont si jeunes, je n’avais pas voulu jusqu’ici considérer leurs histoires, le 1er groupe de jeunes femmes de 14 à 24 ans a été victime de trafic sexuel, et ce soir c’était une première pour elles de se produire, même 3mn.

Je les salue une à une à la française comme ça ne se fait pas ici, je les embrasse.

Emilie, Laurent, tout le monde semble content de cette soirée, je suis sollicitée de tous les côtés, sur les rotules je réponds (avec Emilie qui me traduit) à un journaliste TV de Vientiane, et quand je vois le résultat je me dis qu’un jour il faudra bien que je prenne des cours de communication (merci Papa on peux pas assurer partout) !

22h : Nous finissons autour d’une bière avec Emilie et les Monkey band, pas besoin de ranger : Emilie nous a bloqué une classe pour stocker notre souk jusqu’à demain, ouf !! (C’est un détail pour vous mais après 3 mois de voyage, je vous assure que pour moi ce sont des détails vitaux auxquels les accueillants ne pensent pas forcément. C’est comme de proposer une lessive à un voyageur qui arrive chez vous : j’y aurais pas pensé avant, mais c’est plus facile à proposer qu’à demander.)

22h30 : Salut Emilie. Salut les Vélocipèdes et à demain pour de nouvelles aventures.

Mardi 14 juin 2011

9h : Mal au dos d’avoir trop dormi, et hop à la piscine, petit-déj’ et hop repiscine !!

10h30 : Valise

12h30 : Restitution de chambre

13h : Pressing

13h30 : CCF. Plat du jour, impossible, pas faim, tiens les Monkeyband sont de retour pour répéter avec l’équipe de Tô et de Cécile qui joue demain son spectacle de marionnettes.

14h : Magasin pour réparer mon ordi, c’est le clavier qui est mort, je rachète un ordi plus grand mais en français.

15h : Je cherche en vain des infos pour le bus d’Hanoï, mais rien, aucune info (bon ben ???? heu.. ble ble ble comme dirais Marléne !).

16h : Emilie me conseille d’acheter un disque dur car j’ai trop de vidéos pour graver tout sur DVD.

(Bon ben j’en avais acheté un en France et on m’a dit « t’encombre pas de ça !! » Grrrr…)

Bon ça fait que 100$ en moins sur mon budget !!

17h : Come back au magasin d’informatique où je rencontre cette jolie « Femme Banane »

Comme elle me dit. Une Lao qui a fait ses études en France, qui s’est mariée à un français et qui après 8 ans passés en France ne se retrouve plus ici alors que son mari se satisfait du soleil et du climat, elle est en manque de la France, de ses richesses socioculturelles et de son rythme de vie.

J’arrive plus à partir de la boutique mais j’ai rendez-vous avec les Monkey band pour jouer avant la nuit au bord du Mékong.

18h : CCF. Tous mes bagages sont chargés et divisés sur les trois vélos, ma table trône sur l’avant du vélo de Tayl ; les 4 fers en l’air je grimpe à l’arrière du vélo de Bruno et nous traversons en équipée sauvage la ville jusqu’au Mékong, sur l’esplanade où, le soir, les familles se retrouvent au coucher du soleil pour une marche digestive ou pour des exercices sportifs sur des machines en libre-service.

A peine le temps de descendre des vélos que déjà une foule de 30 personnes est déjà autour de nous. Nous déplions nos instruments, je resserre les boulons de ma table et en avant la musique. Les gens s’agglutinent les yeux grands ouverts, ils viennent voir de plus près ces fous de falangs qui s’agitent. Leurs réactions sont unanimes. Quand ils rient , ils rient tous , leurs réactions sont en oscillation dans le léger vent qui ne nous rafraîchit pas du tout. Après avoir enfilé un des masques des Monkey , je m’approche de cette foule dans un corps animal, les rires sont hystériques sur un simple mouvement de ma tête, mais lorsque je tente de rentrer dans leur groupement panique générale, des hurlements , adultes, enfants, fin de la musique, tout rentre dans l’ordre .

Apres ¾ d’heure de mix entre nos deux projets, nous improvisons avec Bruno un défilé acrobatique sur son vélo géant pour satisfaire les derniers arrivants qui ont loupé notre exhibition .

Stop on plit !! Je prête ma table à un petit lao de 12 ans qui parle très bien l’anglais des rues.

Il grimpe dessus et m’interprète une danse et un chant hip-hop, il est à fond agité du bulbe, c’est un bonheur.

20h : Avec une infime partie de la recette, nous nous payons un riz-légumes pas épicé, enfin c’est ce qu’on avait demandé !!! Et une barquette de crème glacée…

21h : Notre embarcation reprend la route pour la maison de Rouce, une Anglaise de 50 ans qui a accepté d’accueillir les vélocipèdes dans sa grande maison, et pour ce soir, ma table et moi.

La maison est de l’autre coté de la ville, presque en campagne, une maison simple coloniale entourée de grands murs sous des arbres où les insectes sont les rois et chantent sous la pleine lune qui éclaire très bien la hutte en bambou sans mur du jardin où nous allons dormir.

Tay est trop grand pour dormir là donc il profite de la chambre d’amis.

Ballaque a préparé 2 moustiquaires, une pour nous deux et l’autre pour Bruno.

Les moustiquaires c’est bien contre les moustiques, mais là-dessous, on manque d’air à deux.

Ballaque est, comme je le disais, allemande donc grande blonde , enfin à moitié car elle a le crane coupé en deux : d’un coté 2mm de cheveux, et de l’autre de vieilles dreads, pas spécialement glamour et plus trop blonde.

Elle a tout juste 18 ans et un visage de doux bébé qu’elle pense endurcir avec sa coupe de rebelle, tous les jours je tente de lui couper une ses dreads qui pue mais rien à faire ! Moins elle est glamour, plus ça lui va, elle est pourtant si jolie avec ses grands yeux verts, mais elle fait dans le non style genre « chien à punk » !!

Enfin je ne tiendrais pas plus d’une heure sous cette moustiquaire, et je me réfugie badigeonnée d’anti-moustique sous le préau de la maison sur un fauteuil en osier.

Toute la nuit, de mauvaises contrefaçons de coqs français tentent leur cocorico sans succès et sans se soucier du fait qu’il fasse nuit, à cause de la pleine lune peut-être.

Mercredi 15 juin 2011

7h : J’ouvre les yeux sous cette entrée de maison coloniale envahie de verdure que je découvre avec un soleil qui me la montre bien.

8h : Je sors au coin de la rue qui est plutôt un chemin pour prendre au petit marché un café glacé, et en photo un bébé dans un panier.

8h 30 : En cuisine nous préparons un petit-déjeuner de légumes sautés et de riz collant, que nous partagerons sur cette terrasse.

11h : Rangement pour tous, je déboulonne ma table pour préparer mon incertain départ, je ne sais toujours pas à quelle heure est mon bus.

15h :Retour en ville où je trouve enfin les horaires de bus, bon, trop tard pour partir aujourd’hui.

19h : Spectacle de marionnettes cousues et créées par Cécile et les femmes de son asso, et manipulées par l’équipe de Tô accompagnée en live par nos musiciens sans leurs vélos.

Belle rencontre sur scène devant une salle comble à craquer et des enfants déchaînés.

21h : After avec Emilie et Bruno, à la terrasse du CCF, Emilie m’invite à rester jusqu’à la fête de la musique. Heu… il faut que je quitte cette communauté française et que je me reconcentre sur mes objectifs.

22h : Dîner chez Cécile (à coté de la maison) qui nous propose du fromage fondant à qui nous faisons la peau. Cécile se prépare à rentrer en France dans quelques jours avec sa famille, après plusieurs années passées en Asie. Ballaque rentre avec Tayl, elle a des douleurs au genou, pour nous une petite liqueur de riz maison et en route.

23h : Je pense passer une nuit calme sur ma terrasse mais non, le voisin fait péter des pétards et tape sur des casseroles comme s’il faisait une cérémonie pour faire venir une pluie qui ne vient pas.

Après une heure de sommeil, je suis attaquée par les moustiques ou je ne sais quel insecte (de l’écrire un mois après me colle les poils et les frissons). Je me réfugie alors avec mes camarades sous cette moustiquaire, mais il fait chaud et la pluie ne vient pas.

Jeudi 16 juin 2011

7h : Réveil difficile, le soleil nous fait mijoter sous nos moustiquaires, c’est insupportable !! De l’air !! De l’air !!! De l’air !!! Mais je dors debout.

Bah le camping c’est plus de mon âge !! C’est ça de trop fréquenter les vieux, on prend un coup !! (Petite méchanceté gratuite, la première d’une peut-être longue série, quoi que je sois trop bonne au fond)

9h : Atelier cuisine avec Ballaque, je suis sa commis, quel bonheur de cuisiner, je lui demande tout, j’ai peur de plus savoir faire.

10h : Déjeuner en communauté.

11h :Tayl et Balou partent chez un ferronnier finaliser la construction de leurs échasses en bambou.

Ici valise le final !!

12h :Bye bye Rouce

13h : Touk-Touk pour poser mes valises au CCF

16h : Bye bye Emilie et Laurent

18h : Bye bye Bruno, Léonor m’accompagne au touk-touk collectif qui me ramène à cette gare du sud.

18h 15 : Je ne suis pas descendue du touk-touk qu’une dizaine de personnes saute sur ma face de falang pour me vendre un billet pour Hanoï avec sa commission, ils s’arrachent mes bagages.

Je leur interdis de toucher à mes bagages et je leur demande un à un leur prix, et je suis le premier qui me donne le juste prix de 200 000 kips, mais ce garçon veux tout diriger. J’ai faim et il ne veut pas que je sorte du bus où il m’a parquée avec d’autres touristes américains ou australiens alors qu’il nous reste 20mn avant le départ. Il veut que j’attende la pause de 21h, il est hors de question que je mange ce que monsieur a décidé.

Au fond du bus les touristes blancs, et devant les asiates ; il me parle comme à « une merde-aux-œufs-d’or ».

Eh ben moi j’ai pas envie d’avoir du rab et rester plus de temps avec cette bande de touristes exubérants à qui je collerais bien une tape sur la tête, surtout cette blonde en mini-short, le nombril à l’air avec un micro T-shirt découpé dans un drapeau américain.

Je suis pourtant non-violente. J’ai juste -une fois dans ma vie quand j’avais 8 ans- explosé sur le bitume la gueule d’un garçon parce qu’il nous piquait toujours le ballon. Aussi une tapette légère à trois gosses agressifs par réflexe de défense, et depuis rien. Même si ça va être difficile, je ferai tout pour ne pas être enfermée pour coups et blessures d’ici la fin du voyage, promis. Donc je cours m’acheter 2 brochettes et un riz collant.

19h05 : Le bus part, je suis à côté de deux jeunes femmes qui semblent aussi saoulées par l’équipe du fond.

Je m’endors avec le soleil.

21h : Un copilote viens nous gueuler qu’il faut descendre pour manger où ils l’ont décidé, je vais donc plus loin sur cette avenue désertique pour m’acheter un café glacé. On me vend un chocolat glacé mais avec le sourire de la commission. Quand elle m’annonce le prix, je réponds à la vendeuse avec un sourire complice « Falang … » Elle est gênée mais nous rions et j’accepte le prix.

Le bus repart directement et ne s’arrête qu’à la frontière qui est déjà fermée, « trop tard… ». J’en conclus que nous allons dormir là en attendant l’ouverture demain matin.

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